Le BIOP, centre d'Orientation de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris, a organisé, samedi 17 janvier, sa troisième Nuit de l'orientation. Elle s'est déroulée à la Bourse de commerce de Paris, de 15 heures à 23 heures.
A noter cette année, l'augmentation de la place laissée aux professionnels (65) dans le "speed dating des métiers", aux établissements de la CCIP et aux entretiens conseils.
L'atelier "deviens qui tu es" pour découvrir sa personnalité animé par 2 coachs est toujours pris d'assaut...
Xavier Cornu, directeur général de l'enseignement à la CCIP a introduit la table ronde sur l'Orientation en disant notamment qu'il est trop facile de tirer sur les Conseillers d'Orientation-Psychologues si l'Orientation ne marche pas bien en France, alors qu'il s'agit plus d'un problème de trop grande complexité du système, de manque de cohérence, de jonction entre Orientation et formation. Il faut arrêter de faire de l'Orientation un processus anxiogène, mettre autour de la table tous les acteurs, plus montrer les métiers, et laisser le temps aux jeunes de trouver ce qu'ils aiment et ce pour quoi ils sont faits.
Il est remarquable de noter au passage qu'à la table ronde, la CCIP a fait intervenir notamment un psychiatre psychothérapeute, une psychologue-psychanalyste, une Conseillère d'Orientation-Psychologue chargée d'enseignement et de recherche à l'INETOP, un sociologue, alors même que le rapport du HCE fustige la dimension psychologique des professionnels actuels de l'Orientation de l'Education Nationale...
Mme Baudouin, qui forme les Conseillers d'Orientation-Psychologue à l'INETOP de Paris, a montré le paradoxe qu'il y a à demander à des jeunes de se déterminer quant à leur avenir alors qu'ils sont dans la confusion la plus totale, ne sachant pas très bien qui ils sont, car en période de remaniement identificatoire. Et, l'Orientation est une question identitaire, relevant tout autant de déterminants psychiques que sociaux, or ces déterminants psychiques sont le plus souvent occultés...L'Orientation est perçue comme un processus rationnel reposant sur la détection d'aptitudes, d'intérêts, l'apport d'informations, or, il ne suffit pas de dire à l'adolescent ses aptitudes ou intérêts pour qu'il choisisse plus facilement. Les enjeux psychiques à l'oeuvre échappent à la saisie rationnelle.
Détecter pourquoi ils sont faits ? comme si le chemin était fait d'avance, or le chemin est souvent fait de détours, de rencontres...
Les jeunes sont mal informés ? il y a phlétore d'informations avec le développement d'internet, mais il faut pouvoir faire le lien entre toutes ces informations et seul un entretien avec un professionnel de l'Orientation pourra aider le jeune à mettre en perspective et en lien tous les éléments qui font sa vie même.
Mme Labour-Grill, Psychologue-Psychanalyste, relate une recherche qu'elle a menée sur des élèves de 1ère et Term STG en complet désarroi, tout comme des bons élèves de S tout autant désorientés.
Elle se demande la place qu'il reste au désir des élèves face à la pression familiale et sociale.
Pourtant, l'Orientation est un passage incontournable, souvent dénié car trop angoissant, mais faisant parti du processus d'individuation nécessaire de l'adolescent.
Choisir est par essence quelque chose de difficile, que les adultes ne sont pas toujours à même de faire, or on le demande à des ados qui tâtonnent...
Choisir, c'est se confronter à la prise de risques, accepter les erreurs... et il faudrait être soutenu, accompagné pour faire le deuil des idéaux anciens et infantiles, mettre à distance les projections parentales dans des lieux de parole pour les enfants, les parents, les enseignants.
Patrice Huerre, Psychiâtre-Psychothérapeute, interroge sur l'effet de l'ambition des parents pour leurs enfants, sur l'importance des adultes en face des ados, le fait qu'ils rencontrent des figures adultes qui comptent, que les parents sachent rendre compte de ce qui anime leur vie, qu'ils favorisent les rencontres avec d'autres familles, pour élargir le périmètre, voir ailleurs ce qui se passe, et que les enfants ne perdent pas la capacité de jouer avec des représentations d'eux-même plus tard.
Le propre de l'ado est de manquer de confiance en lui, or c'est justement là qu'on lui demande de se positionner.
La tendance à pointer plus ce qui ne va pas que ce qui va, tant à l'école qu'à la maison, fait que les ados finissent par douter de leur valeur, alors qu'il faudrait soutenir leurs potentialités.
Comment réduire l'écart entre ses idéaux (il en faut) et les contraintes de la réalité, tout en ne perdant pas de vue ses idéaux, trouver un moyen de les approcher progressivement dans la réalité, qu'ils soient des idéaux non tyranniques, non persécuteurs.
M. G. Boudesseul, sociologue au CEREQ, fait état d'une enquête portant sur 2600 jeunes (
http://www.cereq.fr/pdf/nef33.pdf) montrant que ce sont les jeunes déjà les plus favorisés (ceux qui redoublent le moins), il les appelle "les protégés" qui bénéficient du plus d'aide (36%), et ceux qui sont les moins favorisés, sans parents proches, sans internet, sans visites, salons (ceux qui redoublent le plus), il les appelle "les malgré nous" qui bénéficient du moins d'aide (19%). Entre les 2, il y a un marais (45%) d'élèves, "les outsiders" qui sont plus guidés par leurs amis et les medias surtout.
Les métiers envisagés par ces groupes ne sont pas les mêmes, les premiers citent médecin, pharmacien, chercheur, les seconds : militaire, officier, technicien de police, maçon, mécanicien...
Il conclue sur le fait catastrophique que les critères d'Orientation soient sous l'emprise unique des critères de performances scolaires, et préconise d'associer beaucoup plus les parents comme ressource pour parler de leurs métiers, de répertorier mieux les lieux de stage disponible, et de favoriser au maximum les passerellles.
http://acop-asso.org/index.php?option=com_content&task=view&id=68&Itemid=149http://www.lesechos.fr/info/france/4816619-le-centre-d-orientation-de-la-ccip-organise-sa-troisieme-nuit-de-l-orientation.htm